Ce vendredi 23 avril, les Députés francophones bruxellois ont approuvé à l’unanimité les 20 recommandations émises par la Commission des Affaires sociales, dans la lutte contre le non-recours aux droits sociaux. Le MR réaffirme sa volonté d’aller plus loin, par les voix de Latifa Aït-Baala et David Weytsman.

Lors de sa séance plénière du 23 avril dernier, le Parlement francophone bruxellois approuvait à l’unanimité 20 recommandations contre le non-recours aux droits sociaux. Parmi celles-ci, le MR a insisté à ce que les indépendants et commerçants se retrouvent comme public prioritaire, aux côtés principalement des familles monoparentales, des jeunes et des ressortissants hors-UE.

En effet, nombre d’indépendants furent désemparés face à la lourdeur administrative des compensation Covid. Notons également que les compensations régionales bruxelloises furent extrêmement faibles, en comparaison avec la Wallonie et la Flandre.

La Députée Latifa Aït-Baala, qui suit le sujet de près, se réjouit que l’on avance en la matière. La libérale explique « je suis ravie que nous ayons voté les 20 recommandations à l’unanimité en séance plénière. C’est un geste fort qui montre l’importance de cette lutte ». La libérale n’a d’ailleurs pas manqué de rappeler la volonté du MR d’aller plus loin et de continuer le travail.

La Députée déposera à ce titre une Proposition de Résolution, avec son collège David Weytsman (Président de la Commission social-santé COCOF). Le texte visera principalement à lutter contre le non-recours aux droits sociaux chez les commerçants et indépendants, en allant plus loin que les recommandations actuelles. « Les recommandations ouvrent une série de portes, nous en priorisons quelques-unes, dans lesquelles nous nous engagerons pleinement » conclut-elle.

David Weytsman ajoute « en tant que Président de la Commission sur ces questions, il me semble essentiel de remercier les acteurs de terrain pour leur travail, mais également pour le temps qu’ils ont accordé à notre commission lors de nos auditions. Nous devons les honorer. Nous avons maintenant franchi un premier cap, que nous complèterons prochainement avec un texte supplémentaire ».

Ci-dessous, les 20 recommandations telles qu’adoptées à l’unanimité

  1. De simplifier et de mieux informer les publics- cibles. La complexité de la législation et des démarches à effectuer auprès d’un public déjà fragilisé est l’une des sources certaines de cette « non-effectivité » des droits. Sans perdre de vue qu’avec la crise sanitaire que nous vivons, la digitalisation de l’information et de l’accès à certains services s’est renforcée, creusant davantage encore la fracture numérique auprès de certains publics plus fragilisés, dont les personnes âgées et les personnes en situation de précarité. Les experts confirment le fait que de nombreuses per- sonnes ignorent l’existence même de ces droits. Il faut dès lors simplifier les documents, le langage, les règles, et donc simplifier toutes les démarches administratives;
  2. D’identifier les besoins en accompagnement social et mettre en place des campagnes d’information et de prévention. Il s’agira également de renforcer la formation en matière de non-recours aux droits des acteurs de la première ligne que sont, notamment, les travailleurs sociaux des CPAS. Les moyens administratifs pour lutter contre la non-effectivité des droits résident dans un premier axe d’actions sous la forme d’un triptyque : publicité active, guichet unique, aide administrative juridique. Ces trois éléments sont à prendre en un unique bloc afin que chacun renforce les autres. Sur le plan opérationnel, ce triptyque peut être modulé en fonction des impératifs rencontrés par chaque CPAS. Par exemple : le guichet unique et le bureau d’aide administrative pourraient ne faire qu’un;
  3. De privilégier la simplification des procédures administratives pour l’usager. La simplification administrative est un corollaire important du triptyque. Cela ne signifie pas que les législations et réglementations le seraient car cela emporterait peut-être ou probablement des modifications des aides sociales, ce qui n’est pas nécessairement le but recherché ici. Il faut dès lors simplifier les conditions d’octroi des droits, mais également les démarches à accomplir, ainsi que la longueur des procédures, parfois redondantes, ainsi que le nombre de documents officiels à fournir aux CPAS notamment;
  4. De fusionner la procédure de demande d’admission et celle de demande d’intervention, afin d’alléger la procédure et de réduire ainsi le délai dans le traitement d’une demande (par exemple pour l’intervention handicap Commission communautaire française);
  5. De renforcer et d’adapter la publicité active spécifique des CPAS auprès de leurs publics-cibles. La publicité active de l’administration consiste à diffuser et à communiquer de l’information d’initiative. Face à un public très fragilisé, qui est dans l’incapacité de trouver la « voie » vers les aides auxquelles il a droit, le CPAS doit développer une publicité active spécifique consistant à diffuser de l’information et à adopter des démarches actives afin d’identifier et toucher ses publics, et à rechercher les publics les plus fragiles de sa circonscription. Cela concerne toutes les personnes en décrochage social, soit à tout le moins les per- sonnes isolées, les personnes désorientées et les sans-abris. L’ambition, par cette publicité active, est que ces publics soient informés et effective- ment dirigés vers le CPAS. Des informations et une première analyse doivent être recueillies avant que les personnes ne soient redirigées vers le CPAS par des organismes de sécurité sociale et/ou tout opérateur offrant des aides sociales diverses et supplétives (personnes handicapées, aides communales, etc.). Les informations recueillies doivent être exploitables par le CPAS et tous les autres organismes même si celles-ci ne sont pas complètes ou exhaustives;
  6. D’identifier les publics cibles et/ ou potentielle- ment éligibles afin qu’ils fassent l’objet d’une certaine proactivité de la part des services publics, via une bonne information ou une automatisation;
  7. D’assurer la proactivité vers les publics-cibles qui ont été durement touchés par la crise. Notamment en mettant en place, pour les services, des politiques outreach, de «hors les murs» pour aller chercher les bénéficiaires potentiels le cas échéant dans leur milieu de vie. À cet égard, nous comptons notamment mais pas exclusivement les familles monoparentales, les jeunes (18-34 ans), les personnes de nationalité non-européenne et les personnes isolées. Ces publics sont repris par l’Observatoire comme étant les groupes plus confrontés à un risque de pauvreté. Une attention particulière doit également être apportée aux indépendants et commerçants. Ce afin de les informer sur leurs droits et sur les démarches à fournir pour leur donner accès à ceux-ci, en renforçant la communication vers ces publics, dans un contexte où certains n’ont pas ou que très peu l’habitude d’aller vers des services d’aide tels que les CPAS;
  8. De créer un bureau d’aide administrative ou, s’il existe déjà, de le renforcer. Celui-ci serait adossé au guichet de première ligne et au service social, et permettrait d’appliquer pleinement l’article 60, § 2, de la loi organique. Il s’agit d’accueillir et d’offrir à tous les publics interagissant avec le CPAS une aide de portée juridique. Ce bureau offrirait un appui administratif et juridique aux personnes désarçonnées par des procédures administratives et des risques de contentieux. Le CPAS pourrait développer ce service en direct ou le créer par délégation et subvention. Il serait aussi relié au bureau d’aide juridique local le plus proche si la mobilisation d’un avocat s’avère nécessaire;
  9. De tendre vers l’automatisation des droits sociaux, en commençant par les droits qui dépendent de la compétence de la Région de Bruxelles-Capitale. L’automatisation de l’échange de données et l’automatisation des droits sont des moyens concrets de lutte contre la pauvreté qui permettent de simplifier les processus bureaucratiques et d’éviter des démarches complexes aux usagers. À cet égard, il conviendra de mettre en place les moyens nécessaires pour que les échanges d’in- formations par voie informatique et non-informa- tique respectent scrupuleusement la vie privée de chacune et de chacun. L’automatisation des droits sera inscrite dans chaque nouveau texte réglementaire, avec si nécessaire une période transitoire;
  10. De soutenir la mise en place d’une étude auprès du niveau fédéral sur l’automatisation des droits;
  11. De tendre vers l’individualisation des droits sociaux et de viser la suppression du statut de cohabitant. Une première étape est d’inscrire l’individualisation des droits dans chaque nouveau texte règlementaire relatif à des matières où cette individualisation est possible;
  12. De soutenir la mise en place d’une étude auprès du niveau fédéral sur l’individualisation des droits. Celle-ci analyserait, de manière indépendante, précise et objective, les effets qu’auraient une individualisation des droits sociaux, tout en préservant certains droits précédemment acquis. Cette étude porterait tant sur les conséquences pour les citoyens, que sur les modifications de budget qu’entraînerait une telle individualisation;
  13. De renforcer les services de première ligne, en leur accordant notamment le temps et les moyens nécessaires pour garantir une qualité de prestation optimale et ce aussi bien pour les services agréés et subsidiés par la Commission communautaire française que par la Commission communautaire commune. Il est impératif également de veiller aux bonnes conditions de travail de ces acteurs de terrain;
  14. De soutenir les services de première ligne dans leurs missions pour assurer un service décloisonné d’orientation (l’exemple des rendez-vous des droits), de pouvoir développer des politiques centrées sur les publics-cibles les plus éloignées des services. Pour ce faire, s’appuyer par exemple sur la modification de l’ordonnance CPAS, qui doit amener les coordinations sociales de ces institutions à mobiliser une réflexion spécifique sur le non-recours. Il s’agira dans cette perspective d’aligner les politiques publiques mono-communautaire et bicommunautaire par exemple, dans et permettre dans ce cadre de mobiliser les services de la Commission communautaire française, notamment les CASG et les CPAS;
  15. De mettre en œuvre le devoir d’information, de simplification administrative (en intégrant la frac- ture numérique), de formation et de sensibilisation du personnel des différents services des travailleurs de toute la ligne (de l’accueil à la délivrance du service). Ainsi que d’évaluer les possibilités de soutien et d’accompagnement des professionnels, via par exemple un accès professionnel au numéro vert urgence sociale afin que chaque assistant social en provenance d’un CPAS ou d’une maison médicale ait accès à une information centralisée, actualisée sur les principaux droits sociaux ou de santé;
  16. De pérenniser et protéger le système des maisons médicales au forfait, permettant de répondre aux besoins de santé sans que le critère financier ne soit un obstacle. Il s’agit également d’harmoniser vers le haut les démarches d’accès aux soins de santé entre les 19 CPAS ainsi que d’attribuer, de manière simplifiée, les cartes médicales et les AMU;
  17. De mettre en place des dispositifs de veille juridique et de communication au niveau de la fédération des CPAS, en coopération éventuelle avec Brulocalis, qui permettraient de « digérer » les informations administratives réglementées, sou- vent évolutives, et de les transmettre aux différents services afin qu’elles puissent être communiquées aux usagers;
  18. De poursuivre le travail communautaire afin de veiller à l’identification des besoins et à la mobilisation des populations. La notion « d’analyse partagée » intégrée dans le décret ambulatoire peut nous aider en la matière, elle vient utilement compléter la notion de travail communautaire pour mobiliser les publics cibles et agir directement sur les déterminants du social et de la santé;
  19. D’intégrer la question de bas seuil à l’accessibilité des services : Nos services et l’exemple de la ligne 0,5 en matière d’accès aux soins est à cet égard particulièrement éclairant, doivent s’adapter afin ne laissez sur le bord du chemin;
  20. De mettre en œuvre les conclusions des groupes de travail et des rapports des experts pour plus d’efficacité. La lutte contre le non-recours aux droits constitue également une priorité pour le SPP Intégration sociale et le SPF Sécurité sociale. Ils ont, à cet effet, créé un groupe de travail spécifique, début 2020, dont les activités ont été stoppées à cause de la Covid-19. Des efforts louables sont entrepris depuis quelques années et à de nombreux échelons pour tenter de remédier à cette problématique du non-recours aux droits. De nombreux rapports ont également été rédigés par les experts, notamment par le Service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale et par l’Observatoire de la Santé et du Social de la Région bruxelloise. Le temps est venu de conclure et de passer à la coordination et à la mise en œuvre des recommandations émises par les différents groupes de travail et auteurs de rapports.